25 décembre 2013

Pour un Noël déculpabilisé

Les commerçants ne sont pas seuls à avoir fait de Noël une fête culpabilisante. En idéalisant les thèmes de la famille, des enfants, de la joie, de la paix, les Églises jouent souvent la même symphonie. Il faut désamorcer cette logique.


Les commerçants ne sont pas seuls à avoir fait de Noël une fête culpabilisante. En idéalisant les thèmes de la famille, des enfants, de la joie, de la paix, les Églises jouent souvent la même symphonie. Il faut désamorcer cette logique.

Prédication prononcée le 25 décembre 2013
Église française de Berne

Lectures: Luc 2,1-20
                Jean 17,1-5

Chers Amis,
Curieusement, la fête de Noël est devenue assez difficile à vivre.
Habituellement, on accuse le commerce être responsable de cette difficulté. On fustige les marchands de paillettes et de cadeaux. Ce sont eux qui ont fait de Noël une fête stressante.
Selon ce point de vue, il faudrait revenir au vrai sens de Noël qui est d'être un message de paix et de justice.

L'Église devrait interroger la modernité, lui dire :
« Qu'avez-vous fait du message de paix de Noël ? »

L'ennui, c'est que c'est précisément en faisant cela que nous devenons culpabilisants.
Nous nous joignons au concert des voix qui nous disent comment notre Noël devrait être, comment notre monde devrait être, et qui nous rendent responsable de ce qu'ils ne soient pas ainsi.

Quoi d'étonnant dès lors que beaucoup de gens vivent Noël dans un certain désarroi ?!
Noël devrait, nous dit-on, être la fête de la famille !
Or ce n'est pas facile d'être une famille. Beaucoup de gens vivent les crises ou même des échecs difficiles.
En idéalisant Noël, on culpabilise ceux qui sont déjà dans la difficulté, plutôt que de les aider à sauver ce qui peut l'être.
 Noel devrait, nous dit-on, être la fête des enfants !
Or ce n'est pas facile d'être des parents. D'où la tentation de vouloir ce jour-là, se racheter de n'être pas parfaits, en offrant des cadeaux qui eux le seraient…
Noël devrait nous dit-on , être la fête de la joie !
Or la joie ne s'invente pas. Et ceux qui sont tristes, ceux qui vivent des deuils, se sentent blessés par le devoir qui leur est donné de montrer les signes extérieurs du bonheur…
Quant à la paix, la fameuse paix de Noël :
Comment dire à quel point nous sentons impuissants devant les crises qui déchirent la planète? Combien elles nous font peur, aussi !
Faire la paix, c'est difficile! Et ça commence en nous. Savons-nous faire la paix? Sommes-nous en paix?

Ce qui est frappant, c'est que bien souvent, les médias, les commerçants et les
Églises jouent en fait la même symphonie culpabilisante !
Ils idéalisent tous Noël, et ne se privent pas de souligner l'écart entre cet idéal imaginaire et notre réalité !
* * *
Or il faut désamorcer cette logique. Et pour cela, il faut chercher sa source.
Et cette source se trouve dans le récit de Noël lui-même. C'est là que se cachent les termes qui, si on les comprend mal, créent cette logique. On y trouve :
        La famille et l'enfance.
        La joie.
        La paix.
* * *
Pour ce qui est de la famille et l'enfance, il est facile de voir que ni l’une ni l’autre ne sont idéalisées dans le récit de Noël.
Au contraire ce qui nous est raconté est d'une extrême sobriété.
– Un couple.
– Une naissance.
– Un enfant placé dans une mangeoire.
Rien que du concret. Et du concret pas très privilégié !
C'est si sobre que dans tous les contes de Noël, on se sent obligé d'ajouter des détails ! Par exemple le sourire de l'enfant, si mignon !
* * *
Pour ce qui est de la joie :
Où apparaît-t-elle ?
Dans l'annonce que les anges font aux bergers !
Et cette joie est au futur !
« Une bonne nouvelle qui sera une grande joie pour tout le peuple ! »
Curieusement, autour de la crèche, il n'y a aucune mention de joie.
Même lors de la visite des bergers : c'est plutôt l'étonnement !
Une joie annoncée. Une joie promise. Mais non pas une joie immédiate ! Plutôt une joie potentielle, au travers de cet enfant, quand il aura grandi et accompli ce pour quoi il est venu !
Pour nous aussi : la joie de Noël trouve sa force dans l'événement de Pâques ! D’une certaine façon, Noël est le début du récit de la Passion ! Il y a un lien entre la naissance de Jésus et sa prière à la fin de sa vie : « Or la vie éternelle, c’est qu’ils te connaissent, toi le seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus-Christ. »
Ce qui nous donne le droit à une joie sobre et respectueuse,
une joie chargée d'espérance. Une joie à recevoir !

Pour ce qui est de la paix, il nous faut écouter le chant des anges :
« Gloire à Dieu au plus haut des cieux,
            et sur la terre paix pour les humains, ses bien-aimés.
»
Il y a ce qui se passe dans les cieux...
            et ce qui se passe sur la terre!
Le chant des anges n'est pas l'expression d'un souhait:
            « débrouillez-vous pour que la paix soit sur la terre ! ».
Non, elle est une affirmation :
            « la paix est sur la terre ! ».
Et où est-elle ?
            La paix de la terre, c'est Jésus-Christ! C'est une paix donnée!

* * *

Un concert de voix nous dit ce que Noël devrait être…
Or l'Évangile coupe court à tout cela. Noël n'est pas à réaliser mais à recevoir.
Notre Noël de cette année ne sera pas parfait.
Pas plus que l’an passé ou l’an prochain.
Tant pis, ou plutôt temps mieux !
 

Le Christ est venu habiter notre humanité telle qu’elle est,
pour la libérer de l'obsession de la perfection !

Acceptons ce cadeau !
Recevons dans nos vies Celui qui leur donne sens !
Noël, le vrai Noël, c'est de se savoir aimé !

Amen


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